Par Jean-Claude SERVANTON

Luc 20, 27-38

Il y a une dizaine d’années, j’ai participé à une retraite ouverte aux prêtres du diocèse. Nous étions réunis à l’abbaye Notre Dame d’Aiguebelle et le prédicateur était Mgr Gaillot, ancien évêque d’Evreux. Celui-ci nous a raconté qu’il avait rencontré un philosophe contemporain qui lui avait posé la question que tout philosophe se pose, que tout homme se pose : « que pensez-vous qu’il y ait après la mort? » Et Mgr Gaillot lui répondit : « Je sais que quelqu’un m’attend. » Belle réponse dont je me souviens encore. Je me l’a suis rappelé en lisant les paroles de Jésus dans ce passage de l’évangile selon Saint Luc qui nous est offert ce dimanche.

« Je sais que quelqu’un m’attend », cette belle réponse m’a conduit à penser aussi à ce qu’un autre philosophe raconte. Après les événements de mai 1968, Roger Garaudy est exclu du parti communiste après un discours qu’il fit devant une assemblée dans une ambiance glacée. Sans doute appelait-il de manière forte le parti à se remettre en question. Il quitta la salle dans un silence de mort… et il se rendit chez son épouse dont il était, je crois, séparé. Celle-ci lui ouvrit la porte et lui dit : « je savais que tu viendrais. » Il savait que quelqu’un pouvait encore l’attendre et lui ouvrir sa porte. Cette confiance, cette foi est la nôtre… après la mort quelqu’un nous attend. « Je sais que quelqu’un m’attend » « Je savais que tu viendrais », comme le fils prodigue de retour vers son Père, comme le Père qui l’attendait. Une vie, une relation, un retour possible pour fort que la mort, un au-delà de la mort.

« Je sais que quelqu’un m’attend. » Comment savez-vous que quelqu’un vous attend? Nous le savons sur le témoignage de toute l’Écriture, de toute la Bible. Depuis Moïse, nous croyons que le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob n’est plus le Dieu des morts mais des vivants. Surtout nous avons reçu le témoignage de Jésus-Christ. Celui-ci a vécu avec Dieu une relation forte, il l’appelle « Père ». Cet amour du Père qui le nourrit lui donne d’annoncer un au-delà de sa mort. Nous pouvons d’autant mieux accueillir son témoignage parce que dans ses paroles, dans ses actes nous reconnaissons une grande humanité qui appelle la nôtre à grandir. Alors quand vient la mort, quand tout paraît fini, nous croyons que quelqu’un nous attend et nous ouvrira la porte en disant « je t’attendais. »

Cette porte s’ouvre sur une présence dont nous avons déjà fait l’expérience en suivant les pas de Jésus, quand il se retire à l’écart pour prier, quand il s’approche des pauvres et des exclus. L’évangile ne nous renseigne pas beaucoup sur l’au-delà de cette porte. Jésus nous apprend aujourd’hui qu’il n’y a plus de génération… tous sont enfants de Dieu et enfants de la résurrection.  « Plutôt que de trop faire travailler mon imagination, je retiens qu’une seule relation demeure, celle avec Dieu… sans doute est-ce dans cette relation unique que nous retrouvons les nôtres. Cette relation dans laquelle Jésus nous a introduits par sa vie, par sa mort, par sa résurrection. C’est ce que nous allons signifier en célébrant après cette messe quatre baptêmes… ce sacrement qui nous associe à sa mort et sa résurrection. Et dans l’Eucharistie nous célébrons le don que Jésus nous fait de sa vie. « Je sais que quelqu’un m’attend » parce que nous croyons sur parole, nous croyons sur la vie d’un homme qui nous a tenu cette promesse : « Aujourd’hui même tu seras avec moi dans le Paradis… »