Par Jean-Claude SERVANTON

Jean 1,6-8, 19-28

Lorsque paroissiens de Villeurbanne et de Bron, prêtres, nous nous sommes retrouvés pour préparer cette célébration et cette journée, tous nous nous sommes réjouis de cette heureuse coïncidence entre ce dimanche de la joie et les anniversaires d’ordination que nous fêtons. J’avoue que je n’ai pas le tempérament à éclater de joie. Il me faut du temps pour être joyeux. Je ne veux pas être un « rabat-joie ». Et comme nous venons de le demander dans la prière d’ouverture de cette messe, je voudrais diriger notre joie vers la joie de Noël. Je souhaite donc d’avance à toutes et à tous un « Joyeux Noël ». Je me suis rappelé les paroles de St Paul dans sa lettre aux Philippiens que nous chantions autrefois en latin à l’introït, c’est à dire au chant d’entrée de la messe de ce troisième dimanche : « Soyez dans la joie du Seigneur, soyez toujours dans la joie ». L’apôtre s’y prend à deux fois pour nous inviter à la joie. Alors je n’ai pas trop honte de m’y prendre au moins à deux fois pour vous exprimer le joie de ce jour.

Aujourd’hui cet anniversaire d’ordination tourne nos regards vers le passé, il y a 40 ou 50 ans. Bien sûr, je garde le souvenir de cette célébration, la date, le lieu, les circonstances… Et puis ensuite les années ont passé très vite. Les années 68 nous ont propulsé dans la contestation. Nous avons cru au changement sans en prévoir les lourdeurs, les résistances qu’il rencontre. Comme dans toute vie, nous avons connu des hauts et des bas. Pour m’encourager, un jour une dame me dit :  » Vous ne savez pas le bien que vous faites. » Je crois que c’est vrai et difficile à accepter, accepter de se déposséder. Un anniversaire nous tourne vers notre naissance, ou un événement qui a fait date et nous glanons dans le passé joie et peines. Nous goûtons la joie du chemin parcouru, la joie des nombreuses amitiés liées, la joie de la fidélité… Celle de Dieu d’abord, c’est à cause de Lui que tout a commencé, la joie de la vie toujours là… cette joie mêlée de reconnaissance et de demandes de pardon.

Aujourd’hui, jour anniversaire, vivons le présent. Aujourd’hui, nous avons voulu faire fête, vous êtes là… amis et proches, frères et sœurs partagent la même foi, évêques et prêtres partagent le même ministère. Aujourd’hui et dans un passé récent j’ai appris la joie de la rencontre, de la rencontre avec vous les amis venus d’ailleurs, avec vous les soignants, avec vous, avec tout cet entourage fait de sympathie, d’affection, d’amitié, de prières… Plus que dans le passé, je sais que la joie naît de la rencontre, plus que de la réussite personnelle. Cette joie nous la trouvons dans l’évangile. Marie n’entonne sont Magnificat qu’au cours de sa rencontre avec Élisabeth. Jésus rend grâce à son Père au retour des disciples qu’Il a envoyés: « Je te rends grâce, Père, d’avoir caché cela aux sages et aux savants, et de l’avoir révélé aux tout petits. »

Aujourd’hui cet anniversaire ne nous tourne pas seulement vers le passé, nous ne fêtons pas qu’un présent riche de nos rencontres, cet anniversaire à quelques jours de Noël, nous tourne vers un avenir. D’habitude un anniversaire nous tourne vers notre naissance de laquelle nous nous éloignons chaque jour. Aujourd’hui l’anniversaire nous rapproche d’une naissance à venir, celle de Jésus en nous et dans le monde de ce temps. Nous vivons la joie d’une espérance, d’une annonce. Ma peine est de voir notre entourage se déchristianiser… alors que je prends de plus en plus conscience de l’importance de Noël, de l’incarnation. Je viens de relire l’exhortation apostolique du Pape François « La joie de l’Évangile ». Maintenant que j’ai plus de temps je lis les livres de ma bibliothèque que je n’avais jamais lus. Ces lectures, la médiation de l’évangile me confirment que notre chemin d’humanité, notre vie à la suite du Christ, est un chemin vers Dieu. A Noël nous fêterons un petit enfant, le petit enfant de Bethléem sans doute, mais surtout le petit enfant qui en passant par la croix et la résurrection nous conduit jusqu’à Dieu. Par son Esprit, par l’évangile, par nos rencontres avec les plus démunis, il naît en nous pour unir sa vie à la nôtre, pour que nous puissions le donner au monde. Notre joie naît bien d’une espérance.