Par Amos BAMAL

Matthieu 17, 1-9

                 La Transfiguration, manifestation de la gloire de Dieu

Nous célébrons aujourd’hui la fête de la Transfiguration, une fête qui passe parfois inaperçue, sans trop de solennité. La tradition biblique nous présente souvent la montagne comme le lieu par excellence où Dieu vient à la rencontre de l’homme. C’est sur le mont Sinaï que Dieu donne à Moïse les dix commandements. C’est aussi sur le mont Horeb que Dieu donne rendez-vous à Elie et permet à ce dernier de le voir passer. L’événement de la transfiguration de Jésus au mont Thabor obéit à cette logique : Jésus amène Pierre, Jacques et Jean sur la montagne sainte. Les trois disciples sont témoins d’une chose qui les dépasse. Le visage de Jésus devient lumineux, il irradie la lumière par tout son corps et ses vêtements deviennent d’un blanc resplendissant. Ces apôtres se réjouissent de voir Jésus converser avec Moïse et Elie. Ils veulent s’installer dans ce bonheur et construire trois tentes pour faire durer cette rencontre. Mais une nuée vient les envelopper, et la voix du Père se fait entendre : « celui-ci est mon Fils bien-aimé. Ecoutez-le ».

En descendant de la montagne, Jésus défend aux trois apôtres de parler de cette scène avant sa résurrection. Il sait que les autres disciples sont incapables de la comprendre avant d’avoir vu son corps ressuscité et spiritualisé.

La transfiguration du Seigneur que nous célébrons en ce jour, ne doit pas se comprendre comme une simple métamorphose extérieure, comme un phénomène merveilleux et magique, mais plutôt comme cette annonce qui s’éclaire soudain dans ses profondeurs, à partir de ce que Jésus vit au plus intime de lui-même, dans sa relation avec le Père.

Il est des moments dans la vie où l’on a de la peine à comprendre cette transfiguration permanente que doit vivre le chrétien. Dans l’expérience de la souffrance, de l’humiliation et de la mort, au cœur de l’échec et de l’abandon, comment accepter que nos vies soient transfigurées ? Pourtant, par sa souffrance et sa mort, Jésus établi le Royaume, non dans un lointain pays de rêve, mais au cœur de la condition humaine la plus dure, la plus défigurée, la plus inhumaine. A tous les exclus, les bannis, les abandonnés, à tous ceux qui sont appelés à porter une quelconque croix dans la vie, Jésus montre son visage transfiguré et transfigurant. Certes, il laisse l’homme avec ses faiblesses et ses souffrances, mais il les transfigure en les prenant sur lui-même et en faisant de la condition humaine la plus pauvre le signe même de la nouvelle proximité de Dieu au monde.

Quelles peuvent donc être les implications de cette fête pour notre vie de foi aujourd’hui ? Au prime abord, il s’agit de s’ouvrir à Jésus reflet de la gloire du Père, apprendre à cheminer avec lui en quittant tout ce qui nous attire vers le bas pour rechercher de la hauteur, symbole de la vie nouvelle qu’il nous a acquise par sa mort. Il s’agit aussi, en contemplant Jésus transfiguré, de comprendre et d’accepter que cette gloire ne pourra habiter pleinement son corps et tout comme le nôtre qu’après la passion et la mort. Il n’est donc pas question de parler de gloire, de résurrection et de transfiguration en cherchant à sauter par-dessus la souffrance et la mort, étapes incontournables pour entrer dans la gloire de Dieu.

En manifestant sa gloire divine à Pierre, Jacques et Jean, Jésus leur révèle à quelle gloire ils sont destinés, eux qui ont tout quitté pour le suivre. Une gloire qui n’est rien d’autre qu’une intimité épanouissante dans le face à face de l’homme avec Dieu.

Enfin, manifesté comme Fils bien-aimé du Père dans la gloire de la transfiguration, Jésus nous est présenté justement comme celui que nous devons écouter et suivre pour que notre gloire et notre beauté de fils adoptifs de Dieu puissent refléter cette ressemblance qui nous lie à Dieu et que nous devons développer continuellement à travers ce que nous faisons et ce que nous sommes.

L’expérience de la transfiguration qui reste une promesse et un éclairage, doit être une expérience désirée et vécue par chaque disciple du Christ aujourd’hui. Le but et le terme de notre foi ne sont-ils pas justement la contemplation du Dieu Un et Trine ? Gravir la montagne de la transfiguration, y rencontrer le Christ doit être une expérience quasi quotidienne. Au cours de cette célébration, laissons-nous transfigurer par l’Eucharistie, et nous ressemblerons au Christ dans sa gloire.

                                               Amen.