Par Amos BAMAL

Matthieu 5, 38-48

« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ».

            La Parole de Dieu en ce 7e dimanche du temps ordinaire, prolonge l’enseignement magistral que le Seigneur Jésus nous a prodigué dimanche dernier quand il disait : « Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux ». Mais comment pouvons-nous surpasser la justice des scribes et des pharisiens ? Telle est la question à laquelle l’ensemble de la Parole de Dieu veut répondre aujourd’hui.

            En nous laissant éclairer par cette Parole de Dieu, nous comprenons que le dépassement auquel le Seigneur nous invite consiste à « être saint comme Dieu lui-même est saint ». Un enseignement donné solennellement par Dieu à son peuple déjà dans l’Ancien Testament (cf. Lv.19,1-2) et repris avec la même solennité par Jésus lui-même dans la conclusion de son discours sur la montagne que nous lisons à travers le passage de l’Evangile de Matthieu retenu pour ce dimanche.

            Un bon parleur, qui se voulait très convaincant, disait un jour à des jeunes qui l’écoutaient passionnément : « l’Evangile est un texte admirable, mais idéaliste et irréalisable ». Et il argumentait son propos d’exemples issus des Ecritures, qu’il interprétait de façon à bien étayer son propos. Qui l’aurait écouté et qui lit le texte de l’Evangile de ce dimanche serait tenter de lui donner raison.

            En effet, comment Jésus peut-il recommander d’aimer ses ennemis ? Comment peut-il demander de faire du bien à ceux qui nous haïssent ? Comment vivre une telle exigence sans être hypocrite ? Est-il possible d’effacer d’un revers de la main nos envies de vengeance ou de revanche, nos haines, nos rancunes, nos conflits plus ou moins ouverts et nos ressentiments ? Peut-on subir la haine, l’injustice et la persécution des autres et continuer à les aimer comme si de rien n’était ?

            La sainteté qui nous différencie des scribes et des pharisiens exige quelques précisions importantes. Avant tout elle n’est pas à réduire à une perfection morale ou légale basée sur le respect d’une loi. La sainteté chrétienne qui nous configure est l’amour de Dieu accueilli et vécu dans la trame du quotidien en se préoccupant du bien-être et de l’épanouissement de tout homme et de tous les hommes comme le fait Dieu lui-même. Un amour inconditionnel qui ne se mesure pas à la couleur, à la taille ou aux qualités des personnes et qui nous pousse à aller toujours plus loin dans le sens du bien.

            Ainsi devons-nous comprendre la portée des exemples concrets qui ponctuent la Parole de Dieu en ce jour : être saint comme Dieu ou aimer comme Dieu nous interdit de faire la différence entre un ennemi et un ami, entre un étranger et un frère, entre le méchant et le bon, car Dieu « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes ».

            Dans le même ordre d’idées, être saint comme Dieu est saint c’est nous entraîner non seulement à ne pas céder à la haine, à la jalousie, à la rancune, à la vengeance mais à développer en nos vies des aptitudes aptes à promouvoir la bonne santé physique et spirituelle des autres.

            Jésus ne nous demande certainement pas de rester passifs face au mal, ou de l’encourager par notre indifférence et notre passivité. Il nous demande d’être doux, non pas d’être lâche. Durant sa passion, il n’a pas tendu physiquement l’autre joue au serviteur du grand prêtre qui l’avait giflé. Il a subi la flagellation, en faisant bien remarquer à Pilate qu’il abusait de son pouvoir.

            Jésus nous invite à combattre la haine autrement que par l’inimitié, le mal autrement que par le mal. L’amour dont il parle, c’est la volonté de faire le bien malgré tout, malgré les incompréhensions, les jalousies, les injustices, les haines, les méchancetés, les ingratitudes. Que la méchanceté ou l’inimitié des autres n’aient pas le dessus sur notre bonté et notre volonté de bien faire, nous dit Jésus.

            En définitive, être saint comme Dieu est Saint et devenir différent des scribes et des pharisiens, c’est tout simplement assumer notre vocation d’avoir été créés à l’image de Dieu et d’avoir été élevés à la dignité de fils et de fille de Dieu. Il s’agit réellement de vivre en honorant cette identité nouvelle que l’Apôtre Paul nous rappelle dans la deuxième lecture de ce dimanche : « Vous êtes le temple de Dieu et l’Esprit de Dieu habite en vous…Tout vous appartient, mais vous, vous êtes au Christ ». Et puisque nous sommes au Christ, c’est donc en référence à lui, à sa Parole et dans la fidélité à son Esprit que notre vie doit désormais être appréciée et gérée.

                                                     Amen.