Par Franck GACOGNE

Matthieu 24, 37-44

Noël ? Non, patience ! Encore quatre semaines. Pas déjà Noël et pourtant, on en parle déjà en famille : « Tiens, où est-ce qu’on va passer Noël cette année », on en parle à l’école, des marchés de Noël fleurissent ici ou là, on en parle en ville, dans les magasins, il suffit d’ouvrir les yeux ou notre boîte aux lettres débordante pour en voir les préparatifs. Et bien ! Dans les églises, pendant 4 semaines, les chrétiens vont vivre le temps de l’Avent. Même si ce temps de l’Avent est avant Noël, ce n’est pas la préparation de la fête de Noël ; l’Avent consiste à actualiser et à donner du sens aujourd’hui sur un événement qui a déjà eu lieu : la venue de Jésus, l’avènement de Dieu parmi les hommes. Je ne suis pas très doué en Anglais, je crois que si l’on devait comparer l’Avent à un temps de verbe conjugué en Anglais, ce serait peut-être le « present perfect progressif », comme pour souligner que l’Avent est un moment privilégié pour faire mémoire de la venue de Dieu de nos vies, mais aussi d’en repérer encore ici et maintenant les traces, les incidences qui en sont toujours les conséquences parfois nouvelles.

Pendant tout l’Avent, nous entendrons parler de la venue du Seigneur et de l’attitude que nous pouvons avoir pour ne pas manquer sa visite. Aujourd’hui, nous l’avons entendu, cette attitude, c’est celle VEILLER. Il est bien question de veiller dans l’évangile d’aujourd’hui, mais c’est très curieux, c’est Jésus lui-même qui nous demande d’être prêt pour sa venue. Il est pourtant déjà là puisqu’il parle à ses disciples. Alors de quelle venue s’agit-il ? Spontanément, je suis sûr que vous pensez qu’il s’agit de sa venue à l’heure de la mort, et c’est vrai comme le dit l’évangile, nous n’en savons ni le jour, ni l’heure. Mais dans l’évangile d’aujourd’hui, il s’agit encore d’une autre venue : celle du Seigneur à la fin des temps, le retour du Christ dans la gloire. On ne s’en rend pas toujours compte, mais c’est pourtant ce que nous prononçons ou chantons à chaque fois que nous allons à la messe au moment de l’anamnèse : « nous appelons le jour de ta venue dans la gloire ». Et bien les premiers chrétiens, nous l’avons lu dans la lettre de Paul, attendaient ce retour de façon imminente. Mais plus les années passaient, plus ils ont réalisé que le retour du Seigneur n’était pas pour le lendemain, et donc que les disciples de Jésus ne devaient pas se contenter d’attendre passivement. Au contraire il leur ait demandé de veiller activement pour être prêt à accueillir le Christ, non seulement à la fin des temps, mais à tout instant ; et c’est cela qu’il nous est proposé de méditer dans ce temps qui précède Noël.

Alors veiller, oui mais comment ? Je vous suggère deux attitudes possibles :

Tout d’abord veiller comme une attitude permanente. Pour cela, je ne vous invite pas à installer chez vous un réseau de video-surveillance, « veiller sur », ce n’est pas « sur-veiller ». Ce n’est pas être vigilant 24 heures sur 24, mais c’est être ouvert à l’imprévu, tenir tous ses sens en éveil, et parfois accepter de ne pas maîtriser le cours des choses. C’est saisir les occasions qui nous sont offertes d’être attentif à l’autre d’oser une rencontre, de renouer un lien qui s’est distendu. La venue du Seigneur s’expérimente toujours dans la relation. Le visage du Christ nous est donné à voir dans celles et ceux que nous n’avons pas choisi, mais que nous croisons. C’est là qu’il nous attend.

Une deuxième attitude possible pour veiller, c’est de prendre résolument un temps de veille… Les pionniers connaissent cette expérience de la veille d’un feu où un échange mystérieux se réalise entre l’obscurité et la flamme qui l’éclaire, qui s’élève, qui réchauffe, et qui nous fait goûter paisiblement cette attente. Ces temps de veille qui sont décidé et choisis peuvent laisser place à la prière. C’est Jésus lui même qui a associé ces deux verbes : « Veillez et priez ». Priez, c’est faire venir à notre esprit des visages connus, c’est faire venir sur nos lèvres des prénoms : ce sont des personnes que nous voulons confier à Dieu parce que nous connaissons leurs histoires, leurs attentes, leurs souffrances. Mais veiller, c’est aussi lui confier des situations qui nous révolte et précisément demander à Dieu que face à elles, il ne nous trouve pas endormis ou indifférent.

De cette façon-là, nous essayons de veiller… Il n’y a plus qu’à le décider. Très bonne entrée dans l’Avent à tous.