Marc 1, 7-11

Par Eric de NATTES

Introduction :

Nous voici au verset 7 de l’évangile selon St Marc. Pas de récit de naissance de Jésus,  pas de généalogie prestigieuse, royale, pas de récit de son enfance pas plus que de sa parenté. Pas de signes célestes, ou terrestres ni d’Annonciation pour préparer sa venue ! Marc entre d’emblée dans le vif du sujet car son intention est autre. Celui qui surgit parmi nous de manière inattendue, qui va dérouter ses contemporains, le fait par mission reçue de Dieu. Et l’irruption de Dieu dans nos vies bouscule toujours. Ce n’est qu’après coup que l’on peut relire des signes et des annonces préparatoires. Ceci est  déjà intéressant pour nous, baptisés. Si notre foi peut s’inscrire dans une histoire familiale, une forme de généalogie spirituelle, la relation personnelle à Dieu est propre à chacun et elle a pu faire irruption dans notre vie. Et elle peut représenter un vrai commencement.

Pour Marc, la naissance de Jésus ainsi que sa parenté sont à chercher ailleurs, si je puis dire, que dans les récits généalogiques traditionnels, si l’on veut vraiment comprendre l’énigme que représente la venue de cet homme, ses paroles et ce qu’il va faire !

Alors que le mouvement baptiste existe déjà (en ces temps-là…) et que, selon les historiens et les exégètes, il est évident que Jésus y a été associé de près (en ces jours-là), il se passe quelque-chose avec cet homme, qui va beaucoup plus loin qu’un simple baptême de purification et de conversion et qui est un surgissement (et aussitôt.)… C’est une épiphanie que nous relate Marc. C’est une véritable naissance, c’est l’attestation d’une identité jusque-là enfouie, une vie insoupçonnée, qui nous sont dévoilées par le geste du baptême. Je souligne deux aspects :

Un contraste saisissant entre le haut et le bas : Jésus est celui dont le Baptiste n’est même pas digne de défaire la courroie de ses sandales (c’était un geste réservé à l’esclave), il est celui pour qui les cieux se déchirent. Et pourtant, il descend dans l’eau pour être baptisé (terme qui évoque quasi la noyade, la suffocation, la mort), et comme pour mieux dire cette descente, cela se produit au lieu le plus bas de la planète, en-dessous du niveau de la mer, le Jourdain, la mer morte.

Voilà ce que les Évangiles vont dévoiler : le mouvement de Dieu est la descente. Celui que l’on cherche en haut habituellement, descend jusqu’aux abîmes de l’homme, de la mort. Le Très-Haut est aussi le Très-bas : ciel et terre désormais sont en contact. C’est parce que Jésus descend que la Voix venue d’En-Haut va proclamer trouver sa joie en lui. Je n’en finis pas personnellement de découvrir ce que cela veut dire dans ma vie comme dans celle des autres. Descendre en soi en l’autre pour trouver le Très-Haut !

Une relation unique se dévoile : Si Marc ne parle pas de la parenté de Jésus c’est parce que d’emblée il situe les liens de Jésus en Dieu-même. Sans cela, son énigme, son mystère, demeure illisible. Pas d’image pour l’origine, mais une voix qui, en dévoilant que celui-ci est le Fils, se désigne en creux comme Père. Mystère du commencement de toute chose. Et pour l’Esprit, souffle, force, énergie, feu vital, joie que donne l’amour dans la relation : une colombe qui descend.

Chacun de nous a son Nazareth, frères et sœurs, c’est-à-dire sa vie cachée dans le cercle de famille. Joies et épreuves. Blessures et étayages. Mais chacun de nous, baptisé, a aussi cette autre parenté.

Lorsque vous priez, dites-vous ‘’Père’’, papa, à ce mystère de votre origine comme de la mienne ? Humble et heureux de vous découvrir son fils, sa fille. Lorsque vous entrez en vous-même pour recueillir le poids du jour, venez-vous dialoguer avec le visage du Fils, votre frère aîné qui vous entraine vers la vie ? Lorsque l’énergie vous manque ou au contraire que le souffle gonfle les voiles du chemin, laissez-vous l’Esprit chanter, exulter, louer ou gémir et intercéder ?

Et lorsque nous voilà rassemblés, comme aujourd’hui, regardez-vous tous ces visages en les recevant comme vos frères et sœurs ? Voici la Sainte Famille dans laquelle Jésus nous introduit.