par Eric de NATTES

Jean 14, 1-6

La Maison du Père

Nous préparer une demeure dans la maison du Père. L’image est douce, chaleureuse, familière. N’y a-t-il pas eu une seule maison dans laquelle nous ne nous soyons pas senti chez nous ? À notre place et aimé. Mais peut-être faut-il franchir l’image faite de murs, de pierres, de tuiles, d’un jardin peut-être… pour mieux comprendre de quelle demeure, de quelle maison il s’agit.

Nous savons que la maison, celle de pierre, avec un toit, peut être bien décevante et triste si nous n’habitons plus le coeur de l’autre qui la partage avec nous, si notre présence n’est plus désirée dans le coeur et l’esprit de l’autre. C’est là qu’est notre véritable demeure, celle qui nous rend vivant, qui fait de nous des êtres vraiment humains. La maison de pierres, de bois, de tuiles n’est belle que pour abriter cette demeure-là. Elle est invisible, comme la vie elle-même qui traverse chacune de nos existences, de nos corps souffrants ou en pleine santé, vieillis ou encore dans la beauté de la jeunesse. La présence se moque du temps et de l’espace. Elle est là, au fond de nous, pour le meilleur heureusement, la force qu’elle nous transmet, parfois, hélas, pour le pire lorsque nous nous rendons compte qu’elle hante notre existence et la rend malheureuse alors que personne n’est en chair et en os à nos côtés.

Et dans cette demeure invisible – notre être profond, fait de nos sentiments, de nos peines et de nos blessures, de nos joies, bref de notre manière unique d’être au monde, de regarder le monde, de le vivre – oui, dans cette demeure profonde où nous accueillons nos proches, celles et ceux qui comptent, alors oui, chacun a sa place. Elle infinie cette demeure-là. Car aucun amour, aucune amitié, aucune présence ne ressemble vraiment à une autre.  Le fils n’est pas le père, qui n’est pas l’ami ou le collègue ou le confident ou l’épouse etc… Elles ne se superposent pas. Elles sont chacune à sa place, elles peuvent se croiser et dialoguer, mais elles sont uniques en nous. Cela s’appelle l’amour, c’est invisible, comme toute force, et pourtant c’est ce qui met en mouvement, cela se diffuse et traverse notre matière et l’irrigue et fait de nous des êtres uniques.

Aujourd’hui, c’est déjà cela que nous sommes venus célébrer, dire à nos chers défunts : ‘’vous avez en nous votre demeure, aidez-nous par votre présence à rester nous-mêmes vivants, à aimer, à mener les bons combats. Soyez en nous les gardiens non pas d’un passé à jamais disparu, passé que nous nous remémorons avec mélancolie, parfois tristesse, dans le deuil, mais aussi de temps à autre avec le sourire sur les lèvres, soyez en nous les gardiens de notre présent et de notre avenir’’.

Pour moi, croyant, je n’oublie pas que celui qui parle en cet instant est Jésus. Celui qui nous a appris à nommer la puissance infinie à l’origine de la Vie, Père. À nous adresser à elle avec familiarité, dans la prière. Merci Seigneur Jésus d’ouvrir la porte à tes disciples incrédules. De leur dire, faites confiance. Le Père de la Vie est une demeure pour chacun de nous. Père nous te confions cette multitude que nous aimons, apprends-nous à entrer dans la confiance et à rester nous-mêmes des vivants.

Amen