par  Eric de NATTES

Marc 6, 30-34

Comme des brebis sans berger

Les cercles autour de Jésus : une impression un peu pagailleuse : les proches (les apôtres) ; ceux qui arrivent et qui partent, nombreux ; les gens, la foule : je reprends tous ces noms pour décrire ces ‘’cercles’’. Jésus n’en semble pas autrement affecté, comme si c’était inévitable. Alors j’écoute, moi qui aimerais, bien sûr, que tout le monde fasse partie du cercle des proches. Mais au fond, est-ce que j’en fais partie moi-même ? Tout est question de point de vue sans doute et de moment ; qu’est-ce qui mesure la véritable proximité à Jésus ? Nous verrons que tel apôtre trahira, tel autre reniera, tels autres fuiront… Alors que les femmes, qui ne sont pas évoquées ici, demeureront auprès de lui. L’attachement à Jésus est une histoire, avec ses allées et venues ; l’écoute et l’obéissance à l’Évangile est une pratique qui déborde largement le cadre strictement religieux. Apprends-moi, Seigneur, à regarder la foule, les gens, les proches, ceux qui vont et viennent, sans souci comptable, sans jugement sur leur foi ou leurs motivations, ou leurs allées et venues, mais avec tes entrailles secouées de miséricorde pour eux tous. Garde-moi des paroles et des attitudes qui exigent de tous et de chacun une obéissance qui fait fuir et divise le troupeau. Garde-moi d’être le pasteur de l’oracle de Jérémie qui disperse et qui chasse.

Les lieux : ceux de la mission dont les apôtres reviennent ; un endroit désert pour prendre du repos, s’écarter ; la mer qu’ils reprennent avec le bateau. Mais par-delà tous ces lieux géographiques, je constate qu’il y a un autre lieu, celui de la relation : ‘’en ce temps-là, les apôtres se réunirent autour de Jésus’’ et aussi ‘’les gens coururent là où se rendait Jésus’’ : là est le lieu pour reprendre vie. Là est l’écart que ni les mers, ni les déserts ne réussissent à créer. Car nous portons en nous les attentes, les inquiétudes, la faim des brebis, et nos propres faims. Comment prendre distance, comment faire écart, si ce n’est en toi, Seigneur ? Quel que soit mon service en ce monde et dans l’Église, que ma langue s’attache à mon palais si j’oublie que je suis moi-même une brebis dont le centre et les verts pâturages, et mon repos, sont en Toi, Seigneur. Fais que tout mon être puisse chanter, ce jour, avec le psalmiste : ‘’Tu es mon berger, Seigneur, tu me fais reposer sur de verts pâturages car tu es le pain essentiel à ma vie, tu me mènes vers les eaux tranquilles car tu es l’eau vive jaillissant en moi, tu me conduis par le juste chemin car tu es toi-même ce chemin, et si je dois Traverser les ravins de la mort, ton bâton me guide et me rassure car tu es la vérité et la vie.’’

Nous avons faim d’être des vivants : Avez-vous remarqué qu’il est question de manger dans ce passage – sans en avoir le temps d’ailleurs – comme à plusieurs reprises dans l’évangile selon St Marc. Inquiétude des disciples pour trouver la nourriture essentielle à la vie. Souci bien légitime et qui est malheureusement celui de bien trop de millions d’humains. Mais quelle faim fait courir ces ‘’gens’’ qui te devancent, Seigneur ? Je ne veux pas anticiper sur le récit de dimanche prochain. Mais tu te mets à les enseigner longuement. Et ils semblent ne plus se soucier de leur faim, en cet instant. Et moi, pour ce temps de repos qui s’annonce peut-être, quelle est ma faim ? Ô Seigneur, si chaque eucharistie pouvait être cet instant où tu viens apaiser nos faims, faim de la vie véritable. Cette vie que tu possèdes en plénitude.