Par Amos BAMAL

Mt 5, 1-12a

         « Votre récompense est grande dans les cieux »

                Bonne fête de la Toussaint à tous ! Sœurs et frères, ce souhait ne s’adresse plus aux saints du ciel déjà intégrés dans la gloire de Dieu, mais à chacun d’entre nous, car tous, depuis notre baptême nous partageons la sainteté de Dieu, nous qui avons reçu son Esprit.

En accueillant l’Esprit Saint, nous sommes devenus filles et fils adoptifs de Dieu comme nous le rappelle l’apôtre Saint Jean dans la deuxième lecture de ce jour : « Voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu,-et nous le sommes-mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement »1Jn3, 1-2.

                En nous appuyant sur cet éclairage de Saint Jean, la sainteté se révèle comme la semence de la vie divine ensemencée en chaque homme et femme et appelée à s’éclater dans une manière de vivre qui soit le reflet de ce que Dieu est : à savoir, une vie illuminée par l’amour, la justice, la droiture, la bonté, la miséricorde et la bienveillance. Une vie exempte de tout mal et marquée par un épanouissement sans limite , bref une vie de joie et de bonheur conformément au texte des béatitudes de l’évangile énoncé par Jésus comme le signe et la marque de ceux qui ont accueilli Dieu.

                Dans la Parole de Dieu proposée à notre méditation, Jésus présente la sainteté comme le bonheur ouvert à tous et accessible à tous. Accéder à ce bonheur, c’est être saint. La foule rassemblée autour de Jésus représente les hommes et les femmes dans leurs diverses situations. Les pauvres, les doux, ceux qui pleurent, les assoiffés de justice, les miséricordieux, les affamés de justice, les artisans de paix, les persécutés, les calomniés, constituent l’échantillon de notre humanité. C’est à cette humanité que Jésus apporte la Bonne Nouvelle : « Heureux, les pauvres de cœur, le Royaume des cieux est à eux ».

                L’évangile de ce jour en effet, chante le bonheur des saints, la joie intérieure qui les a habités et qui est devenue la joie exubérante du ciel. Les béatitudes ne vantent pas le bonheur de ceux qui sont pauvres de cœur à regret, de ceux qui sont doux par faiblesse, de ceux qui pour pleurer se lamente, de ceux qui pratiquent la justice pour plaire, de ceux qui pardonnent par calcul…Il s’agit plutôt de ceux qui ont intériorisé ces valeurs et les vivent avec joie et sérénité, du plus profond d’eux-mêmes.

                Les saints sont des personnes qui ne cherchent pas à être bien vus, mais à faire ce qui est juste et qui ennobli notre humanité. Ce sont des personnes qui ont su dépasser leurs faiblesses pour croire en la conversion et en l’infinie miséricorde de Dieu. Les saints en effet ne sont pas nés tels, ils le sont devenus au prix de l’effort et des sacrifices. Ils ont vécu dans la foi et la confiance en Dieu, dans l’humilité et l’abandon, s’engageant simplement à transformer les situations auxquelles ils étaient confrontés. Se considérant pécheurs, ils ont reçu l’amour de Dieu qui pardonne, et ils ont opéré progressivement des changements dans leur vie et dans celle de leur entourage.

Ils ont su s’affirmer face aux facilités et tentations fallacieuses de ce monde…Il n’est pas facile d’être « pauvre de cœur »dans un monde où le pouvoir et la richesse dictent leur loi, d’être « doux »à cette époque où la violence physique, verbale ou psychologique est omniprésente, d’avoir le « cœur pur »dans un monde qui nous propose des valeurs antiévangéliques, d’être « artisan de paix » quand les groupes de pression alimentent les conflits, quand les lobbies attisent les guerres et développent l’industrie de l’armement. Et pourtant, il nous faut revenir à la simple perception du saint, qui est cette personne ayant su réagir pour affirmer courageusement qu’on peut être dans le monde tout en vivant autrement, comme le Christ.

                Alors que aujourd’hui, le monde vit dans la détresse, mais profondément animé d’un désir, d’une soif de bonheur, la Parole de Jésus n’est pas seulement réconfortante mais elle rassure. Le bonheur dont parle Jésus n’est pas un simple vœu, un souhait, un désir, mais une réalité, certes située dans le futur, mais certaine à cause de celui qui l’annonce et le promet. « Réjouissez-vous, car votre récompense sera grande dans les cieux ».Ainsi, la joie et l’espérance que procure la Bonne Nouvelle dans la vie présente prélude et anticipe la joie de bénéficier de la récompense au ciel. Le ciel de demain est préparé durant notre vie terrestre.

                Nous aussi, nous pouvons être saints et connaître ce grand bonheur que proclame le Christ, c’est d’ailleurs la volonté de Dieu que chaque homme et femme parvienne à la sainteté. Celle-ci n’est pas réservée à une élite de fidèles mais à tous. Les saints ne sont pas non plus uniquement des figures du passé lointain mais aussi nos contemporains. A titre d’exemple, Jean Paul II et Mère Térésa que nous avons connus ont été canonisé il y a quelques temps. Leur exemple est une preuve que la sainteté est possible même de nos jours.

                Cet épanouissement et cette gloire que nous contemplons aujourd’hui en Dieu et en ses saints du ciel, il est possible de les vivre dès maintenant en nous laissant façonner par l’Esprit Saint, en respectant les exigences de notre baptême et en luttant contre les germes du mal qui sont en nous et qui sont contraires et nocifs à la semence de la vie divine. La vision de Saint Jean dans le livre de l’Apocalypse présente ainsi les saints comme ceux qui reviennent de la grande épreuve et dont les vêtements ont été purifiés par le Sang de l’Agneau. A nous de choisir de ne faire que du bien pour appartenir à la multitude de ceux dont les noms sont inscrits dans les cieux.

                En célébrant donc la fête de la Toussaint aujourd’hui, nous voulons rendre grâce à Dieu qui nous a donné la possibilité de partager sa gloire en nous choisissant comme ses filles et fils adoptifs. Nous rendons grâce surtout pour tous nos frères et sœurs qui ont mené le bon combat au cours de leur pèlerinage terrestre en renonçant au mal et en choisissant continuellement le chemin du bien, même dans la douleur et les difficultés. Enfin, en nous souhaitant mutuellement bonne fête de la Toussaint, nous voulons nous tenir la main dans la main, pour grandir ensemble dans cette vie divine qui fait notre héritage commun et pour nous encourager à résister au péché qui veut ternir cette vie ou même nous l’enlever définitivement.

Les saints d’hier, nous les célébrons aujourd’hui. Les saints de demain sont déjà au milieu de nous, nous pouvons en être, si nous le voulons.

                                                Amen.