Par Franck GACOGNE

Jean 17, 11-19

La prière, c’est difficile ! La prière c’est important pourtant, parce que c’est une manière privilégiée pour manifester que l’on est croyant, mais que dire, et qu’est-ce que cela change ? Jésus ne nous laisse pas nous débrouiller tout seul avec la prière. Ce chapitre 17 de Jean est étonnant car il nous montre Jésus lui-même en train de prier son Père. Jésus n’en est pas dispensé, c’est pour lui une nécessité. Nous découvrons dans ce passage sa propre prière. Que demande-t-il ? : « Père saint, garde mes disciples unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un, comme nous-mêmes ». Avons-nous souvent à notre esprit cette image de Jésus en train de prier Dieu pour nous aujourd’hui ? Car il prie pour ses disciples d’hier mais aussi d’aujourd’hui. Et qu’est ce que Jésus demande nous concernant ? Il souhaite, il espère que nous sachions rester uni. Non pas unis entre nous, comme si les chrétiens devaient former une caste ou un club d’initié où on se serre les coudes contre un monde hostile. Non, la demande de Jésus, c’est que nous soyons unis en lui, que Jésus soit la raison et le moyen de notre unité. C’est pour cela que nous n’avons pas à rechercher l’uniformité, à être tous semblable, nous serons unis quand nous serons capables de regarder vers le même Christ et Seigneur, c’est lui le garant de l’unité.
Qu’est ce qui fait aujourd’hui l’unité de notre assemblée ? Nous le voyons bien déjà dans la disposition de l’église : Nous sommes rassemblés, mais tous tourné, orienté vers l’autel, et vers la Parole de Dieu. L’évangile nous dit que cette Parole est vérité, elle nous permet d’être en vérité, de faire la vérité dans nos vies. Le pain consacré et la Parole : deux lieux privilégiés inséparables où Dieu se donne : « Pour eux, je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient eux-aussi, sanctifié dans la vérité ». Jésus se donne lui même tout entier, sa prière en donne la raison : « pour qu’ils aient en eux ma joie et qu’ils en soient comblés ».
Il reste la question du monde dans ce passage. Les chrétiens ne sont pas une caste ou un club d’initiés. Alors comment comprendre la demande de Jésus qui souhaite que nous ne soyons pas du monde, mais envoyé dans le monde. Pas du monde, mais dans le monde. Que faut-il comprendre de ce paradoxe ? Le mot « monde » utilisé par Jésus, ne signifie pas l’univers qui nous entoure, ni même l’ensemble de l’humanité, parce que de ce monde là nous ne pouvons et nous ne devons pas nous affranchir. Dieu lui-même vient l’habiter pour l’aimer et le sauver : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique » (Jean 3, 16). C’est pourquoi le monde dont il est question dans notre lecture est celui que nous-mêmes faisons exister par les décisions de nos libertés. Des libertés qui n’ont pas toujours le sens du bien commun ! Jésus nous met en garde contre un monde où chacun voudrait tirer la couverture à soi ou récupérer la plus grosse part du gâteau. Jésus nous invite à prendre de la hauteur. Etre témoin du Christ, c’est prendre une posture particulière, singulière qui s’inscrit pleinement dans le monde où nous vivons, mais vis à vis duquel il peut être parfois pertinent d’interpeller et de se laisser interpeller, d’exercer son discernement et son esprit critique à la lumière de l’Evangile sans nécessairement se laisser happer par la pensée du plus grand nombre.
Voilà la prière de Jésus, adressée à son Père pour ses disciples, pour qu’ils soient fidèles à ce qu’il leur a donné. Et nous aujourd’hui, entendre cet évangile nous interroge sur deux points : notre fidélité à la foi que nous avons reçu ; et notre capacité à notre tour de pouvoir demander à Dieu dans la prière que son Eglise celle d’aujourd’hui et celle de demain, par chacun de ses membres puisse demeurer fidèle, entreprenante, et inventive à sa Parole reçue.
Comme le fait Jésus lui-même, j’invite chacun à ce temps de méditation et de prière.