Par Damien GUILLOT

Jean 12, 20-33

Frères et sœurs, en ce temps-là, non pas il y a 2000 ans mais en mars 2014 après la messe autour d’un verre de l’amitié ; Noel et Bruno interpellent une femme passant par là et lui proposent un verre. Elle répond : « Oh vous savez, l’Eglise ce n’est pas trop mon truc mais boire un coup pourquoi pas ». Et discussion faisant elle se met à leur expliquer à quel point elle est en colère contre Dieu face à ce que vit sa petite fille malade. Et voilà que mes Philippe préférés vont voir André qui ce jour là s’appelait Damien pour lui parler de cette rencontre et lui dire que cette femme et son mari aimeraient peut être parler de tout cela. Un an après, un mail, et cette rencontre a eu lieu.

Entendre ce couple dire leur angoisse face à la mort prochaine de leur petite fille et leur incompréhension de l’action ou de l’inaction de Dieu, les entendre dire comment leur petite fille ne semble pas malheureuse même si cela ne doit pas être toujours facile et que c’est en fait eux qui trouvent que ce qu’elle vit c’est invivable, les entendre dire comment s’est formé autour d’elle tout un réseau de personnes qui sont touchées par sa joie de vivre et sa façon d’être, les entendre parler de leur engagement pour les personnes âgées, ce couple m’a donné d’entendre la réponse que Jésus donne aux grecs qui veulent le voir. « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul mais s’il meurt il porte beaucoup de fruits. Qui aime sa vie la perd, qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle. Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où moi je suis, là aussi sera mon serviteur ». Je ne sais pas si après notre rencontre, ils voient quelque chose du Christ ressuscité dans ce qu’ils vivent mais en tous cas, je vois autour de cette petite fille quelque chose de cette puissance de vie et d’amour alors qu’à vue d’homme : cela ne vaut pas le coup d’être vécu. Je sais aussi qu’il ne faut pas généraliser et que des situations de souffrance peuvent broyer.

A leur question mais qu’est ce qu’il fait Dieu ou ne fait pas par rapport à leur petite fille ? Cela ne rejoint-il pas notre question qu’est ce qu’il fait le Père par rapport à la mort du Fils sur la croix ? Cette mort atroce, où le Christ n’a pas fui dit un Amour qui va jusque là, jusqu’au don de sa vie car il n’y a pas de plus grand Amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Un Amour dans lequel nous sommes engagés à donner notre vie, un amour qui nous sauve pas sans Dieu, pas sans nous, seul l’Amour reçu transforme nos vies : pas d’abord notre culpabilité, pas d’abord nos propres forces !

Le Père n’intervient pas et laisse mourir le Fils. Je crois qu’il ne peut pas agir directement. Et que quand il crée l’humanité, dans son amour, il en fait une humanité libre et responsable n’intervenant en ce monde que par l’intermédiaire des hommes et des femmes dans le souffle de l’Esprit. D’où peut être l’importance de la prière en nos vies. Dieu qui fait ci, Dieu qui fait ça : qu’est ce que ça veut dire de Dieu ? Et si Dieu était inutile… Est ce que nous ne devrions pas sortir de cette catégorie de l’utilité pour parler de Dieu. Si Dieu était inutile ou utile uniquement en nous donnant et en nous appelant à être ce qu’il est.