Par Damien GUILLOT

2 Co 12, 7-10

« Lorsque je suis faible c’est alors que je suis fort ». Frères et sœurs comment comprendre ? Naturellement ne faisons nous pas l’éloge de la force et ne mettons-nous pas notre énergie à lutter contre tout ce qui est faiblesse ? L’Eglise a été critiquée à juste titre de faire l’éloge de la faiblesse car souvent son discours sur la faiblesse pouvait se rapprocher du sado masochisme : « il faut souffrir pour obtenir son paradis… ». Son discours sur la faiblesse était très culpabilisant en insistant sur le péché de l’humanité alors comment comprendre « lorsque je suis faible c’est alors que je suis fort ».

Prenons l’image d’une coquille d’œuf d’oiseau de canard. Apres avoir couvé ses œufs, le petit caneton dans sa coquille devra casser avec son petit bec la coquille pour laisser le caneton sortir, s’ouvrir à la rencontre de sa mère, du monde, de la lumière. Heureusement que cette coquille est fragile et ne laisse pas comme emmuré le petit caneton dans cet œuf.

Il semble y avoir dans la vie une mauvaise fragilité et une bonne fragilité. La mauvaise c’est celle qui enferme en lien souvent avec des peurs (le problème ce n’est pas la peur car la peur c’est naturel. Ce qui doit nous interroger n’est ce pas l’état dans lequel nous met la peur ?) Il y a bien une mauvaise fragilité en lien avec tout ce qui condamne, tout ce qui réduit, tout ce qui enferme ou culpabilise, tout ce qui compare rendant jaloux, égoïste et aigri.

Et puis il y a peut être une bonne fragilité. Celle qui m’invite à l’humilité, à la vérité de l’autre avec ses propres fragilités qui ne me font plus peur, à la vérité de celle et de celui que je suis avec ses qualités et ses difficultés faisant tomber les masques, cette fragilité qui n’emmure pas mais qui casse pour laisser grandir avec ce que je suis celui que je suis, pour s’ouvrir aux autres, au monde, à Dieu. Une fragilité qui met en creux pour accueillir. Une fragilité qui me donne soif des autres, de Dieu. Oui « Heureux les pauvres de cœur, le royaume des cieux est à eux » et chaque béatitude devient alors une force.

Frères et sœurs qu’a fait le Christ ? Au dernier repas, il rompt le pain, son corps, au sens où il casse le pain car c’est dans cette rupture qu’il inaugure l’alliance et s’ouvre au don, au partage, à la relation. Sur la croix, il s’abandonne au monde et au Père et alors dans cette impuissance se dit la puissance de son amour qui se donne, qui sauve.

Cette contemplation de Dieu tellement fragile, tellement dépendant de notre accueil, tellement ouvert à la relation nous donne de méditer comment « lorsque je suis faible c’est alors que je suis fort ».