Par Eric de NATTES

Marc 7, 1-23

Pur/Impur

Écoutez-moi, tous, et comprenez bien ! Nous allons essayer Seigneur… Si tu insistes autant, c’est que l’enjeu doit être important.

1°) ’’Vous laissez les commandements de Dieu pour vous attacher à la tradition des hommes.’’ Le commandement de Dieu, n’est-ce pas ce qui ouvre à l’infini de la présence de l’autre, de la blessure qu’il provoque en moi ? ‘’Tu aimeras ton prochain comme toi-même ! Tu béniras ton ennemi ! Tu inviteras à ta table celui qui ne peut te rendre la pareille ! Tu accueilleras l’étranger, toi qui as été en exil sur la terre d’Égypte ! Pardonne, 77X 7X ! Aimer ton Dieu de toutes tes forces, de toute ton âme.’’ Et ainsi de suite. Je comprends vite, face au commandement de Dieu, combien je ne peux que crier : ‘’prends pitié de moi, Seigneur, je ne suis qu’un homme pécheur.’’ Ton commandement, Seigneur, c’est ce qui me décentre de moi et me place face à l’infini de ma responsabilité devant la vie, sa grâce et sa fragilité sans fond.

Les recommandations de la religion : me laver les mains avant le repas, donner telle offrande pour le pardon de mon péché, me purifier au retour du marché, manger du poisson le vendredi… cela je peux le faire. C’est contraignant, certes ! Mais pas infaisable. Plus que cela, c’est parfois tout à fait judicieux. La pandémie que nous traversons nous rappelle que des gestes aussi simples que se laver les mains après avoir passé du temps dans les transports en commun peut-être une très bonne habitude ! Et curieusement on nous dit aujourd’hui que jeûner durant certaines périodes de l’année est une très bonne hygiène de vie. Question cependant : Est-ce que ces pratiques m’ouvrent à l’altérité, à l’infini ? À l’amour du prochain ? Ou est-ce qu’elles me referment sur moi, sur une complaisance sur moi-même ? Ma pureté. Je suis plutôt quelqu’un de bien et de méritant. Un vrai bon pratiquant.

2°) ‘’Ils prennent leur repas avec des mains impurs.’’ Ce qui devrait manifester le lieu de la communion entre les hommes – le repas – les nourritures données par la terre à tous, et partagées pour la joie de tous les convives, avec la parole qui s’échange, ce repas que Jésus a tant affectionné, le prenant chez les pharisiens comme chez les publicains, ce repas dont il a fait le sacrement de sa présence et que nous célébrons en cet instant, voici donc que des prescriptions et des interdits alimentaires viennent empêcher son miracle de s’accomplir : rassembler les hommes autour de la même table. Ce qui devait unir divise, ce qui devait rassembler sépare les purs et les impurs. C’est l’eucharistie elle-même qui s’en trouve ébranlée, elle qui nous offre les prémices du repas dans le Royaume, tous pécheurs, rassemblés autour de la table royale du pardon offert.

3°) ‘’Ce qui sort de l’homme, voilà ce qui rend l’homme impur.’’ Seigneur, il y avait tes commandements qui nous ouvraient à l’infini de la vie, voilà que ta vision de l’impureté nous fait entrevoir l’infini de notre misère possible : ce qui sort de notre coeur… c’est immatériel, des pensées tordues, perverses… et pourtant, elles vont devenir actives par nous-mêmes qui allons les répandre comme un virus contagieux sur notre entourage et peu à peu sur la société elle-même. C’est tellement plus simple de garder mon estomac de viandes interdites que de garder mon cœur de lâcher le poison qui va corrompre la vie, la dénaturer, l’avilir.

‘’Qui séjournera sous ta tente ?’’ Je vais à nouveau chanter le psaume de ce dimanche, Seigneur, et écouter Jacques : ‘’Accueillez la parole semée en vous !’’