par Jean-Pierre GILNET

Matthieu 5, 17-37

« Non pas abolir, mais accomplir »

Frères et Sœurs bien-aimés,

En ce 6e dimanche du temps ordinaire A, Jésus prolonge l’enseignement des deux dimanches antérieurs du discours sur la montagne, les béatitudes. Aujourd’hui, Jésus nous place dans le principe du changement, de la continuité et non dans la logique du « Taboularaza ». Il n’est pas venu détruire, casser, briser, nier, rejeter ce qu’un prédécesseur avait fait de bien, de beau et de bon. Mais au contraire, il est venu apprécier, corriger, consolider et ajouter du neuf…. Quelle belle leçon !

Dans l’Évangile du jour, Saint Mathieu nous laisse comprendre que rien de beau, de bien, de bon ne peut se construire en dehors des normes. Il faut nécessairement suivre les règles et les principes établit. Sinon c’est la débandade. Pour nous aider à aimer et respecter la loi, Jésus utilise deux adjectifs utilisés dans le cycle de croissance : petit et grand. Celui qui ne respecte pas la loi et enseigne son non-respect est déclaré « petit ». Ici, petit peut avoir le sens de « fraudeur, transgresseur, tricheur… ». Pourtant, celui qui respecte et enseigne le respect de la loi sera décalcairé « grand » dans le royaume des cieux. Ici, grand peut signifier « loyauté, droiture, honnêteté et rectitude ». Cette personne loyale, comme le dit Paul dans la deuxième lecture du jour, est pétrie de la sagesse de Dieu. Elle est sage aux yeux de tous. L’auteur du psaume 119 fait éloge des hommes intègres qui marchent suivant la loi du Seigneur et demande au Seigneur d’ouvrir ses yeux afin que lui-même, il observe ses commandements et contemple sa loi. Nous le savons tous : « la loi du Seigneur est joie pour le cœur » (Psaume 18).  Qui n’aime pas cultiver chez lui une certaine probité ; une certaine sagesse, une certaine loyauté ?

Toutefois, les lois, les règles ne sont pas établies pour opprimer l’homme. Elles sont érigées pour le bonheur de l’homme. Dans le récit de la création (Gn 2, 16-17), après avoir créer l’homme et a tout mis à sa disposition pour son bonheur, Dieu lui donne des normes et des prescrits à observer. Et, la transgression de ces normes conduit directement à la mort disait le Dieu créateur à l’homme, sa créature de prédilection. Ainsi, le décalogue a été donné à Israël par Moise pour son plein épanouissement, sa fidélité au Dieu créateur et pour le détourner de ses vielles tendances, ses mauvaises pratiques. En aucun cas, Jésus ne saurait venu pour abolir la loi et les prophètes parce qu’il vivait et partageait une triple unité avec son Père : Unité de nature ; Unité d’œuvre ; Unité de nom (Jn 10, 22-42). En effet, Jésus et son Père ont la même substance, ils ont le même nom (Dieu) et ils travaillent ensemble. Se faisant, Jésus nous demande de protéger et consolider les œuvres de nos devanciers tout en innovant autant que cela est possible. Et, si on a une parole à dire concernant un devancier, dite une parole bonne et constructive nous dit Saint Paul : « Aucune parole mauvaise ne doit sortir de votre bouche » (Ep 4,29).  C’est peut-être en ce sens que le comédien et auteur dramatique français Philippe Nericault Destouches soutient que « La critique est aisée, mais l’art est difficile ». Encore, une très belle leçon morale !

Apparemment, personne n’aime qu’on lui fasse des reproches ou des leçons de moralité. On le comprend bien. Cependant, tout dépend de la manière, du moment et de la méthode utilisée pour le faire. Voila pourquoi certains livres de la Bible et bien des maitres spirituels le font. C’est le cas de Ben Sirac le sage dans la première lecture. Enveloppé dans son veston de moraliste, il utilise deux autres images pratiques ayant des conséquences positives et négatives chacune : l’eau et le feu. Il nous demande de choisir. Or, l’eau peut tuer et purifier aussi bien que le feu. Tout dépend de l’usage que l’on en fait. L’une ou l’autre peut conduire à la vie ou à la mort. Dieu nous crée avec notre liberté. Il nous laisse libre de choisir. Pourtant, Ben Sirac nous dit que Dieu n’a commandé à personne d’être impie et ne donne pas la permission de tomber dans le péché. Car les impies et les pécheurs se privent du regard bienveillant et amoureux de Dieu. On doit choisir, mais comment choisir ?

Il n’est pas un fait surprenant pour personne que l’un des meilleurs noms de Dieu, après l’amour, c’est la miséricorde. Dieu est tendresse et miséricorde, lent à la colère et plein d’amour (Ps 103,8). Ce 6e dimanche met en relief la dimension du pardon et de la réconciliation. De même que Dieu le Père est miséricordieux, aussi bien que Jésus, son unique Fils le prouve. Ecoute-le en ses termes : « Laisse ton offrande la, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande » (Mt 5, 17-37). Une exhortation à la réconciliation. Les offrandes ont toutes leurs importances à l’église. Mais, elles seront plus significatives si la personne qui les donnent ne sont pas des personnes rancunières ou orgueilleuses. Aujourd’hui, la réconciliation paraît assez difficile parce que nous vivons dans un monde rempli d’orgueil. Puisse la Très Sainte Vierge Marie intercéder pour nous afin que son unique Fils nous procure la grâce de la réconciliation et la volonté de nous pardonner les uns les autres.

Gilnet JEAN PIERRE