Par Père Lys Mokoko

Marc 12, 28-34

« Ecoute Israël : tu aimeras… »

Fidèles du Seigneur,

Certainement le grand mal de notre siècle vient du fait que nous n’écoutions plus Dieu nous parler au cœur de ce monde, et comme Dieu n’est plus écouté, l’homme remplace ce vide par lui-même c’est-à-dire l’homme s’écoute lui-même. Nous autres modernes voyons très souvent les commandements comme une violation de liberté. C’est de cet appel à l’écoute de Dieu et à l’Amour qu’il s’agit dans les passages bibliques de ce jour. Un scribe, c’est-à-dire un bibliste de pointe, un spécialiste des Ecritures vient poser la question à Jésus sur le plus grand des commandements. Une telle question montre bien que l’enjeu de la question est ailleurs. Jésus lui répond en résumant les 613 commandements juifs de l’époque en une seule loi ayant deux dimensions profondément liées « tu aimeras Dieu de toute ton âme et  ton intelligence, et tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Telle est la nouveauté et l’originalité apportée par notre Sauveur Jésus-Christ. Cette nouveauté-originalité montre que l’Amour est à vivre et non à réciter simplement. Si Jésus résume toute la loi dans l’Amour c’est pour signifier que c’est l’Amour qui est l’essentiel pour une vie et cette réalité est souvent si difficile à vivre, car nos vies connaissent tellement une évacuation spectaculaire et une érosion des valeurs spirituelles si bien que nous devenions vide de Dieu, vide du prochain, le meilleur monde qui existe est celui que je me fabrique en moi, l’horizon qui existe est celui que je projette pour assouvir mes propres désirs égoïstes.  Les formes d’égoïsme qui entourent souvent nos vies prouvent à suffisance que dans notre civilisation actuelle, l’Amour de Dieu et du prochain ne cimentent quasiment plus nos relations et beaucoup d’hommes et de femmes ont des cœurs secs vidés de la sève aimante. Jésus nous redit ce matin que l’Amour construit et reconstruit le corps et les relations, et l’Amour de Dieu appelle l’Amour du prochain et l’Amour du prochain révèle celui de Dieu. Notre plus grand malheur vient peut-être du fait que nous découpons l’Amour en morceau alors que l’Amour n’est pas morcelable et lorsqu’il est morcelé, l’Amour devient incomplet, car l’Amour est complet lorsqu’il intègre le divin et le prochain.

Dans la première lecture, Moise non seulement rappelle ce commandement d’Amour, mais il insiste aussi pour que le peuple le garde à jamais dans son sœur : « ces paroles que je te dis aujourd’hui resteront gravées sur ton cœur ». Moise avait pleinement conscience que son peuple est un peuple qui pouvait oublier facilement cette recommandation divine. Tout comme Israël d’hier, nous chrétiens d’aujourd’hui, nous sommes très souvent un peuple qui oublie facilement son identité et sa mission dans le monde : aimer le créateur et communiquer son Amour au prochain. Notre monde ne peut se construire véritablement que grâce à l’Amour, car l’Amour construire le corps social et le corps social se nourrit et vit de l’Amour. Nous ne vivons que pour aimer parce que c’est l’Amour qui sauve et restaure le monde, il n’y a que l’Amour qui peut nous sortir de l’engrenage de la violence, la guerre, des idéologies suicidaires. Le  monde paye très chair le manque d’Amour, car lorsque notre cœur se vide d’Amour, ce sont des guerres qui s’installent en nous et autour de nous et ces guerres laissent tant de veufs, d’orphelins, de miséreux, de blessures familiales et professionnelles. Certainement la grande révolution que notre monde attend, n’est plus la révolution industrielle et scientifique, mais la révolution de l’Amour que Jésus a inauguré. Et cette révolution de l’Amour ne se dit pas seulement, mais se fait, se vit, elle passe par la circoncision de notre cœur, car il est important que le commandement de l’Amour s’incarne et vitalise nos cœurs, nos vies et nos projets. Nous pouvons faire confiance à Saint Augustin qui dit de manière saisissante : « si tu te tais, tais-toi par Amour, si tu parles, parles par Amour, si tu corriges, corriges par Amour.  Aie au fond du cœur, la racine de l’Amour : de cette racine, rien de mauvais ne peut sortir ».  Que notre Dame de Lourdes intercède pour nous afin que la sève de l’Amour irrigue nos vies. Amen