Marc, 14 et 15

Par Eric de NATTES

Je regarde :

  • La femme rudoyée, tourmentée par des hommes pour son geste d’adoration envers Toi, Seigneur. Pourquoi cette hauteur, ce dédain, voire ce mépris de la part de quelques-uns ainsi que dit l’Évangile, pour ce qui n’entre pas dans les vues de ceux qui se croient proches de Toi, à la même table ? Pitié Seigneur pour ces chefs religieux, ce clergé dont je fais partie, et qui, voulant rappeler le sacrement qui unit l’homme et femme, jugent et humilient les homosexuels dans un texte inutile. Je repense, en cette heure, à la retraite que j’avais prêché devant DUEC, Devenir Un en Christ (association de chrétiens homosexuels), à ce couple d’hommes, croyants : 25 ans de vie commune sans jamais rien avoir revendiqué à l’Église. Heureusement, des voix s’élèvent, de cardinaux, d’évêques, de baptisés, de croyants homosexuels pour qu’on en finisse avec ces stigmatisations qui ne servent à rien d’autre qu’à blesser des groupes entiers et à les éloigner du Christ Sauveur ! Toi, tu as accueilli l’onction de cette femme ! Gratitude infinie. J’en suis donc peut-être digne, moi aussi, malgré ma misère… c’est magnifique.
  • Seigneur, vois notre tristesse indignée devant ces chefs religieux du Temple (Grands-Prêtres et scribes) que l’âge aurait dû rendre sages et bons et qui agissent par ruse, comme des politiques retors, qui utilisent les faux témoignages, instrumentalisent le pouvoir politique pour qu’il exerce la violence à leur place, en brandissant la peur de la sédition, du soulèvement. Tous les vices du pouvoir dans leurs esprits corrompus. Quelle honte ! Ton silence, désormais, Jésus, devant le mensonge, la fausseté. C’est l’heure de Satan. Tu es venu sauver, et eux, ils sont venus dominer, juger, condamner. ‘’Ne pas avoir peur’’, Seigneur, tu l’as dit à tes disciples, pour rester libre. Alors, regarder de près mes propres frustrations, mes déceptions, me connaître dans cette part obscure de moi-même, pour que ce sol profond, enfoui, cette tourbe malodorante ne devienne pas colère qui se transforme en haine et se trouve enfin un exutoire, un bouc émissaire à abattre ! Le processus est bien connu mais je ne dois pas croire qu’il se produit toujours en l’autre. Je peux en être le terreau involontaire puis consentant.
  • La foule manipulée qui réclame des condamnations : Oh Seigneur, garde-moi de cet esprit grégaire, d’imitation, qui me rassure ; je pense ‘’comme tout le monde’’ ! Je hurle avec les loups ! Ça me donne l’illusion d’être fort au milieu de mon désarroi. Mirage de ténèbres. Apprends-moi à discerner, à évaluer par moi-même, à arrêter de laisser les autres penser et s’indigner pour moi, à les laisser insulter, condamner en mon nom, au nom du peuple, soi-disant. Manipulation par les désirs bas : du spectacle, de la mise en scène, de l’indignation agitée pour mieux manipuler.

Mais quand l’abjection, quand ce qui est vil et tordu semble dominer, que l’obscur se répand, je me redis les mots de St Paul. Sans doute une des hymnes les plus anciennes des premiers chrétiens. Toi qui étais de condition divine, tu n’as rien revendiqué. Tu es descendu jusqu’au plus bas de notre humanité. Serviteur alors que tu es le maître. Et c’est Toi que le Père a exalté et dont le nom a été élevé plus haut que tout. Alors comme les premiers chrétiens je le confesse et le chante jusque dans la nuit : c’est Toi qui est Seigneur à la gloire de Dieu le Père ! Amen.

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