Marc 1, 21-28

Par Eric de NATTES

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Il enseigne avec autorité

‘’Il enseignait en homme qui a autorité.’’ Rappelez-vous, les disciples qui ont été appelés et qui ont laissé leurs filets ! Je crois qu’ils commencent tout juste à réaliser ce que leur geste va désormais signifier dans leur vie. Tous les filets dont ils vont devoir être libérés. Ils ont quitté le bord de mer et les voici maintenant dans le lieu de l’enseignement : la synagogue. Et les voilà frappés en plein cœur. Foudroyés. Rien de comparable à l’enseignement des scribes. D’ailleurs, et en nous sommes un peu frustrés : de l’enseignement à proprement parler de Jésus, nous n’avons aucun mot. Mais en revanche une parole. Il parle vraiment. Ce choc, cet étonnement, peut-être même cet effarement va mettre tout leur être en mouvement. On ne se met pas en mouvement quand ça ronronne. Une parole qui les oblige à se situer, à prendre partie, à entrer en eux-mêmes pour comprendre. C’est cela une autorité : ce qui vous oblige à grandir et à devenir adulte. Et Jésus n’en manque pas !

Et voici un homme tourmenté maintenant, qui se débat en lui-même, et Jésus qui le libère d’un savoir inutile, plus qu’inutile, un savoir vicieux qui le ficèle au lieu de lui apporter une libération. Ce savoir qui s’avère être, au bout du compte, impur. Intéressant ! Car ce savoir n’est pourtant pas faux en soi : ‘’Jésus de Nazareth, je sais qui tu es : le Saint de Dieu !’’. Y a-t-il un mot qui soit faux ? Où est l’impureté ?

Eh bien sans doute dans la manière, dans le mode, dans la manière : il sait ! Qu’est-ce que cela veut dire ? Dieu est une quête, une recherche, qui met en mouvement tout l’être. Une quête humble. D’ailleurs, tout à l’heure, nous allons dire : ‘’je crois’’. Pas : ‘’je sais.’’ Et en plus il sait dans la peur, pas dans la confiance et dans la paix. Que peut apporter un tel savoir : une certitude fondée dans la crainte… De l’encombrement, de l’intolérance, voire du fanatisme.

‘’Tais-toi !’’ Entendons bien, Jésus n’intime pas à l’homme, à l’être humain, de se taire. Mais à ce qui parle en lui et qui n’est pas lui. Il lui intime de laisser, lui aussi, ses filets. Dans ce mode là, de la crainte qui enserre, même si les mots sont justes, le résultat est faux. Car la vérité est chemin et vie. Dans ce savoir-là, il n’y a plus de chemin et la vie est ligotée. C’est un contre-témoignage.

Les gens sont stupéfaits. La renommée de Jésus s’étend. De cela aussi les disciples devront être libérés, par la Passion et par la Croix. Quel chemin, Seigneur, pour entendre la Parole ! Celle qui est chemin et vie. Pas les mots qui ficèlent ou ceux qui promettent la réussite ou la gloire, mais ceux qui engendrent la vie. Le monde et l’Église sont pleins de ces mots portés par un esprit impur et par les hommes qui les profèrent, tourmentés eux-mêmes, assoiffés de reconnaissance. Apprends-nous à discerner avec jugement.

Viens Seigneur nous libérer de ces savoirs inutiles qui nous collent à la peau et que nous répétons, possédés par eux, sans savoir quoi en faire pour nous-mêmes. Viens faire retentir en nous Ta Parole à Toi, celle qui a autorité, celle qui délivre, libère, aide chacun à entrer en lui-même et à se connaître pour mieux Te connaître. À devenir comme Toi. Aujourd’hui, Seigneur, peut-être nous faut-il passer par la mort de ce savoir impur pour que Ta Parole soit à nouveau entendue. C’est en tout cas mon espérance pour moi-même et pour ton peuple. Apprends-nous la vraie mesure du temps que nous vivons. Ce que tu accomplis en cet instant, ce qui meurt et renaît.