Par Jean-Claude SERVANTON

Luc 18, 9-14

J’ai lu dans le missel des dimanches en illustration de l’évangile de ce dimanche la prière d’un poète. Celui-ci, s’adressant à Dieu, lui dit : « J’ai eu vent de toi ». J’ai trouvé belle cette expression pour nous conduire à la prière.

« J’ai eu vent de toi ». Nous avons vent de bien des choses, de bien des événements. Nous avons eu vent que quelqu’un de notre entourage était malade, qu’un autre était guéri, qu’un tel était parti en voyage, qu’un autre était revenu. Si nous tenons à la personne dont nous avons eu vent, nous cherchons à en savoir davantage. Si c’est possible nous essayons de la rencontrer, de lui écrire, de lui téléphoner. « J’ai eu vent de toi. » Et oui nous avons eu vent de Dieu sinon nous ne serions pas là aujourd’hui. Ce vent a soufflé plus ou moins tôt dans notre vie. Nous sommes toujours dans le même vent pour avancer dans notre recherche de Dieu. Et la prière est l’un de ces temps forts de notre recherche puisque nous lui parlons. Le vent est un appel à mieux le connaître : qui donc est ce Dieu dont nous avons eu vent? Le pharisien et le publicain de la parabole ont eu tous les deux vent de Dieu. Tous deux sont montés au temple pour prier. Mais l’un et l’autre se laissent-ils porter par le même vent? Ont-ils eu vent du même Dieu?

Au moment où je médite ce passage de l’évangile, le vent souffle au dehors, je l’entends et je vois les branches des arbres s’agiter. Le vent vous pénètre, vous courbe, vous pousse… Le pharisien et le publicain me font penser au chêne et au roseau de la fable. Le chêne campe fièrement sur ses racines. Le pharisien se tient debout, il campe sur ses bonnes actions. Il affronte le vent fièrement. Mais est-il dans le bon vent? A-t-il eu vent du vrai Dieu? Le publicain a affronté le vent, le vent d’une vie secouée par l’appât du gain, de s’en mettre plein les poches, mais il a eu vent aussi d’un Dieu autre, d’un Dieu qui pouvait aussi l’emporter dans le vent de sa miséricorde, de son amour. Dans ce bon vent que dire à Dieu? Rien ou peu de choses…que nous sommes faibles comme le roseau mais que grâce à sa miséricorde, il est possible d’être secoué sans se casser, sans être déraciné. A la fierté mal placée du chêne s’oppose l’humilité du roseau.

Le roseau, le publicain, ayant eu vent du vrai Dieu, devient un homme juste, il se laisse souffler par la bonté de Dieu. Le souffle de Dieu le délie de ses biens, comme un autre publicain, Zachée, donnant la moitié de ses biens aux pauvres. Le voilà libre, libre comme le vent, libre de s’attacher à Dieu, de se mettre à son service, libre d’aller au vent des pauvres comme le dit encore le poète. Notre prière nous place dans le vent de ce Dieu dont nous avons eu vent par la parole de Jésus. Notre prière alors nous envoie à la rencontre de ceux et celles dont nous avons eu vent pour les aimer. Le même vent souffle, anime notre prière et notre action.