Par Amos BAMAL

Luc 22,14-23, 56

                        La dernière ligne droite.

Aujourd’hui, nous entrons solennellement dans la dernière semaine de notre temps de carême. Le long évangile proposé à notre méditation nous donne une idée de tout ce que nous allons vivre tout au long de cette semaine. Jésus que nous avons suivi pendant tous ces jours, atteint le sommet de son amour par le don de lui-même sur une croix pour le salut de l’homme. Aujourd’hui, il entre en grande pompe dans Jérusalem. La foule qui entoure Jésus à Jérusalem est plurielle et changeante. Pour le meilleur et pour le pire. Elle est plurielle en ce qu’elle agit de manière différenciée : certains étendent leurs manteaux sur le chemin alors que d’autres coupent les branches, certains sont devant Jésus, tandis que d’autres le suivent. L’évangéliste lui-même parle de « foules » au pluriel, comme pour signifier l’absence d’unité. Elles sont changeantes parce qu’après avoir crié : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur », elles vont crier à nouveau : « Qu’il soit crucifié ».

Au-delà de cette ovation de la foule, ce dernier virage de la vie terrestre de Jésus nous invite à relire en filigrane la grande aventure consentie par Jésus, par amour pour nous et par obéissance à son Père. Pour effacer la désobéissance de nos ancêtres Adam et Eve, il prend le contrepied de leur attitude orgueilleuse, oublie sa condition divine et se met à la disposition de son Père en faveur de son projet pour notre humanité. Un projet dont la réalisation va le soumettre à la haine, aux humiliations et à des atrocités de toutes sortes, jusqu’à la mort sur la croix qui était le châtiment réservé aux bandits. A l’instar du serviteur souffrant évoqué par le prophète Isaïe dans la première lecture, Jésus va assumer son aventure terrestre sans contestation ni récrimination, sans révolte ni amertume, mais en gardant confiance à son Père, quelles que soient les difficultés qu’il rencontrait et en méditant sans cesse ses instructions.

Le chemin de vie que Jésus montre par sa passion est donc celui de l’amour : à la violence déchaînée contre lui, Jésus oppose simplement l’amour. Par sa passion, il triomphe du mal et de la haine au moyen de la douceur et de la compassion. Notre époque connaît une montée alarmante de la violence, de l’agressivité et des guerres. Et la prescription que le Christ fait pour cette maladie mortelle, c’est l’amour, un amour qui pardonne et invite à recevoir le pardon que Dieu donne en son Fils. Et si nul d’entre nous n’échappe, un jour ou l’autre à ce grave poison qu’est la violence qui mine l’existence humaine, pensons que notre Seigneur a voulu venir jusqu’à nous pour nous faire comprendre qu’elle n’est pas une fatalité.

En nous proposant de relire en ce dimanche des rameaux cette ultime étape de la vie de Jésus, l’Eglise, en fait, vise à tracer une feuille de route pour nous tous, disciples du Christ, en marche vers la célébration de la grande fête de Pâques.

Durant le carême, nous nous sommes entraînés à obéir à Dieu, à rechercher et à faire sa volonté. Tous les efforts consentis en cette période n’ont de sens que s’ils peuvent nous conduire à partager la gloire dont le Père a comblé son Fils. En attendant la résurrection de nos corps à la fin des temps, la gloire du Christ qui doit être dès maintenant notre gloire, c’est de pouvoir nous épanouir totalement libérés du péché et enracinés dans une vie de charité, de justice, d’amour et de paix. A notre tour de passer de la passion à la résurrection en laissant l’Esprit du Ressuscité éclairer nos choix et nos engagements, nos échecs tout comme nos succès. Dans la passion et la mort de Jésus de Nazareth l’humanité nouvelle est née : le règne de la grâce a commencé. Désormais, nos crucifix nous montrent le chemin à suivre : celui de l’amour des autres, quoi qu’il en coûte, celui du pardon.

Seigneur Jésus, je suis écrasé par le poids de mon péché. Je suis triste et accablé devant cette souffrance que je t’ai causée. Je ne mérite plus d’être enfant de Dieu et pourtant c’est toi qui me relèves, me pardonnes, me guéris, me libères et me redonnes ma dignité de Fils de Dieu. Ton amour pour moi est le plus grand des trésors et ma seule espérance.

Loué sois-tu ! 

                                                              Amen.