Par Jean-Claude SERVANTON

Marc, 12, 28b-34

Voilà un passage de l’évangile que nous connaissons par cœur… Maintes fois commenté. Alors qu’en dire de plus? Il résume tellement bien toute la morale du christianisme.  Nous parlons tellement de l’amour de Dieu et du prochain qui ne font qu’un. Peut-être en parlons nous trop. C’est pourquoi je ne retiens que la conclusion de ce dialogue entre Jésus et le scribe: « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu. » En effet, nous pouvons nous demander: que lui reste-t-il à mieux comprendre? Pourquoi n’est-il pas déjà dans le Royaume?

Je suis étonné qu’un scribe qui est très savant, qui connaît bien la loi puisse s’avancer vers Jésus pour lui demander: « quel est le premier de tous les commandements? » c’est à dire le b.a.-ba de la loi.  On nous explique qu’alors l’essentiel de la loi était dilué dans 613 préceptes. Comme les autres pratiquants de la loi, le scribe est écrasé par une loi qui prévoit tout, qui ne laisse aucun espace. « Ne fais pas ci » « Ne fais pas ça ». On ne s’en sort pas. La vie est corsetée. La loi permet de juger les autres. Il y a ceux qui l’appliquent et qui sont justes et les autres qui en prennent et qui en laissent…les injustes. La vie quotidienne est cadrée et aucun écart n’est permis.

Encore une fois Jésus répond en ramenant la loi à l’essentiel, à l’amour de Dieu. Ce Dieu est à aimer avec tout soi-même, son cœur, son esprit, sa force. Il ajoute l’amour du prochain. Par sa réponse, il desserre l’étreinte de la loi. Il ouvre un espace. Il redonne au pratiquant de la loi une responsabilité. Il en appelle à notre liberté. Il permet de remettre les obligations en place. Il fait travailler notre intelligence. Le scribe s’ouvre et découvre par lui-même qu’aimer Dieu et son prochain vaut mieux que toute offrande d’holocaustes et de sacrifices. Le scribe prend du recul et Jésus reconnaît que sa réponse est judicieuse. Cet homme a fait un grand pas. Je trouve quand même, que si nous nous en tenons là nous passons un peu à côté. Nous parlons tellement de l’amour du prochain et de l’amour de Dieu comme identique que nous risquons de masquer notre foi. Etre chrétien est-ce seulement aimer les autres? Les autres n’en font-ils pas autant? Pourquoi rester chrétien?

« Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu ». Tous ceux et celles dont la vie est conduite par l’amour de Dieu et du prochain ne sont pas loin du Royaume de Dieu. Que leur manque-t-il? Au scribe si proche du Royaume il manque encore de suivre Jésus, d’aller avec Lui jusqu’au bout de l’évangile. Il lui reste, il nous reste d’aimer comme Jésus a aimé, d’aller avec Lui jusqu’au bout, au lavement des pieds, à la mort sur la croix. C’est là que Jésus nous entraîne avec Lui à entrer dans le Royaume de Dieu par la croix et la résurrection. Comme chrétien nous n’obéissons pas seulement à un commandement, fut-il celui de l’amour, nous suivons quelqu’un. Nous croyons en quelqu’un: le Christ. Ce qu’il a dit au scribe, il l’a fait. Il a uni dans sa vie l’amour de Dieu et du prochain. Nous ne suivons pas une loi mais quelqu’un de vivant. Une loi est incapable de sauver. Elle nous laisse toujours à distance du Royaume de Dieu. Il y a toujours un chemin, un chemin de vie à la suite du Christ. Lui seul a pu dire : « Tout est accompli. »