Par Eric de NATTES

Jean 10, 11-18

Le Bon Pasteur

Discerner le Bon Pasteur et le berger mercenaire.

1°) Le bon Pasteur connaît ses brebis. C’est le cas d’ailleurs, selon l’image qu’emprunte Jésus à la vie pastorale, du vrai berger. Le troupeau est bien composé de brebis uniques, chacune avec sa personnalité. Cette connaissance implique une vraie relation, et cette relation est déjà le signe du mouvement de l’amour, c’est-à-dire de ce qui est premier. Chaque Brebis est aimée pour elle-même, dans la découverte de la manière dont la vie du Père s’épanouit en elle et pas en une autre.

2°) Ce Berger-là est prêt à se dessaisir de sa vie et à la recevoir à nouveau, ce qui ne signifie pas forcément la mort dans ce contexte. Mais le don de lui-même pour que la vie de cette brebis-là trouve son chemin propre. C’est l’action de Jésus : le relèvement de la vie et l’envoi dans cette vie renouvelée. Maintenant, va ! Mais la mort elle-même sera la manifestation d’un don librement consenti.

3°) Ce berger est bon. Ce qui, dans le vocabulaire grec n’a rien de doucereux ou de mièvre, et n’est pas synonyme de ‘’gentil’’. Cela veut dire qu’il est ajusté à sa fonction de pasteur. Qu’il répond aux exigences de la mission qui lui est confiée.

1°) Le berger mercenaire ne tue pas ses brebis, mais il n’a pas de relation vraie avec les brebis, il ne les connaît pas, ce n’est pas le mouvement de l’amour qui l’habite.

2°) Les brebis sont alors pour lui un moyen d’accéder à autre chose qu’à la vie de chacune pour la conduire. De la reconnaissance, de la notoriété, du pouvoir, de la richesse, voire à assouvir ses propres passions dévoyées.

3°) Il n’est pas question pour lui de se dessaisir de sa vie pour la vie de la brebis. C’est au contraire la brebis qui est dessaisie de sa vie pour alimenter celle du berger mercenaire. Elle est instrumentalisée.

Apprenons à discerner en l’autre et en nous-mêmes ce double mouvement. Nul doute que St Jean fait déjà allusion à des situations d’emprise et de dispersion du troupeau de la part de pasteurs mercenaires dans la première Église. Si les bergers mercenaires rôdent toujours dans l’Église et dans le monde, je veux dire ici mon émotion lorsque j’entends une catéchiste me dire sa préoccupation pour cette fillette qui va être baptisée dans une situation familiale douloureuse dans laquelle rien n’est ‘’aux normes’’, si je puis dire, et qui va se battre pour que ce baptême ait lieu et soit une fête pour cette petite brebis déjà éprouvée par la vie. Cette mère ou ce père qui se dessaisit de sa vie pour la vie de son enfant pour qu’il trouve sa voie et vive. Ces baptisés qui se dessaisissent de leur vie pour trouver, dans une situation d’urgence comment accompagner cette famille pour qu’elle retrouve le chemin de la dignité, de la vie… Bref, le monde est aussi plein de bons bergers, c’est une action de grâce !

‘’J’ai d’autres brebis qui ne sont pas de cet enclos.’’ St Jean fait sans doute allusion à l’Église qui commence à sortir de l’enclos culturel et cultuel d’Israël. Ici, à Bron, lorsque je regarde la diversité de nos couleurs de peau, de nos enclos d’origine, je me dis que le Bon Pasteur s’est fait entendre de par le monde. Mais je pense aussi aux croyants d’autres religions. Comment les oublier ? Je pense à la communauté musulmane qui nous a envoyé ses vœux pour Noël, je sais qu’ils ont, dans leurs Écritures, quelques versets qui disent ceci : « Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu’il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans vos bonnes actions. Votre retour à tous se fera en Dieu ; il vous éclairera alors au sujet de vos différends. »

Nous cheminons vers Pentecôte et le don pour chacun de dire ‘’les merveilles de Dieu dans sa propre langue’’. Apprends-nous la patience Seigneur, ‘’mille ans pour toi sont comme un jour’’. Rassemble-nous, dans la diversité, dans la joie, lorsque les temps seront accomplis.

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