Par Jean-Claude SERVANTON

Luc 17, 11-19

Le lépreux guéri se jeta la face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce. On apprend aux enfants à dire merci… rendre grâce signifie adresser à Dieu un grand merci. Est-ce si important qu’il est recommandé de garder cette habitude toute sa vie? Est-ce si important qu’aujourd’hui dimanche nous sommes ensemble pour rendre grâce à Dieu, pour lui adresser un immense merci, n’est-ce pas le sens du mot Eucharistie »? Notre foi ne serait-elle pas toute entière dans cette démarche du lépreux samaritain revenant sur ses pas?

Nous connaissons des tas de gens au cours d’une vie, on en connait du monde. Le marchand de légumes auquel je révélais que j’étais prêtre me dit : « j’avais remarqué que vous connaissiez beaucoup de monde ». Je fus heureux de ce compliment. Nous disons parfois que nous connaissons quelqu’un de vue, c’est à dire que nous ne le connaissons pas beaucoup. Certaines personnes, nous les connaissons mieux. Nous pouvons décliner leur identité, par des conversations, des rencontres nous avons appris leur histoire, nous percevons une part de leur tempérament, de leur caractère. Entre elles et nous demeure cependant une distance. C’est un peu ce qui se passe entre les lépreux et Jésus. Les lépreux restent à distance parce que contagieux et Jésus à leur vue garde la distance. Il les envoie se montrer aux prêtres. En cours de route ils furent purifiés. Les voilà guéris, les voilà revenus comme avant. L’histoire en reste là pour neuf d’entre eux.

Un seul, un samaritain, un étranger revient sur ses pas… Lui seul revient pour rendre grâce, pour dire merci, pour exprimer sa reconnaissance. Les professeurs de français nous apprennent la riche signification de ce mot… Re-connaître… Connaître une deuxième fois, revenir sur ses pas… La reconnaissance dirait le renard du Petit Prince c’est créer des liens, s’apprivoiser, se rapprocher, établir une relation. Le lépreux guéri, revenant vers Jésus, abolit la distance. « Il se jette la face contre terre aux pieds de Jésus… » Il exprime ainsi sa foi, cette foi qui dépasse toute connaissance. Il reconnait Jésus comme fils de Dieu. Et en même temps, il exprime son action de grâce à Dieu, son immense merci. Il se reconnait. Ainsi en est-il de la foi. Elle n’est pas seulement une connaissance de Dieu ou de Jésus. Certes celle-ci est nécessaire. Mais la foi va plus loin, elle est merci et accueil d’une relation. La vie du lépreux ne reprend pas comme avant sa purification. Il a rencontré quelqu’un.

« Relève-toi, va, ta foi t’a sauvé ». Va, nous retrouvons dans l’évangile le mouvement de la foi, le mouvement de la Messe, de l’Eucharistie. Nous sommes revenus à l’église. Par sa Parole, Dieu s’est approché de nous, nous nous sommes approchés de lui. Et en Jésus il a aboli toute distance en se donnant, et nous, nous allons lui rendre grâce, lui dire notre merci. Alors au terme de l’Eucharistie, il nous dira encore d’aller, de vivre cette relation qui nous sauve, qui nous rend plus vivant, plus heureux, qui nous met debout.