Par Amos BAMAL

Luc 24, 35-48,
                                       Être témoins du Christ ressuscité.

Tout au long du temps pascal qui nous conduit à la Pentecôte, les évangiles du dimanche nous font entendre le récit des apparitions du Christ ressuscité à ses disciples. A travers ces manifestations du Seigneur nous voyons comment, peu à peu, les disciples s’ouvrent à la foi en la résurrection du Christ. Et nous sommes invités à parcourir le même chemin pour entrer nous aussi dans la foi au Christ ressuscité. Le passage de l’évangile de Luc que nous venons d’entendre, vient à la suite du récit bien connu des disciples sur la route d’Emmaüs. Il en reprend d’ailleurs les accents. En effet, les disciples d’Emmaüs rejoignent les Onze, pour dire leur joie et conter les circonstances de leur rencontre avec le Seigneur. Ils parlaient aux autres de leur reconnaissance du Seigneur « à la fraction du pain », et voilà que Jésus lui-même est là…Certainement Jésus était déjà là puisqu’après la résurrection il est avec les siens partout et toujours.

Dans cette apparition de Jésus aux Onze le soir de Pâques, les questions qui se posent aux disciples concernent l’identité de celui qui se tient devant eux et la forme de sa présence. L‘évangile nous dit en effet « qu’ils croyaient d’abord avoir affaire à un esprit » (Lc 24,37). Ils imaginent qu’il s’agit d’un fantôme. D’une certaine manière c’est absurde puisque par définition un esprit ne se voit pas, alors que dans le cas d’une apparition il ya justement quelque chose à voir. Pour les aider à surmonter cette difficulté, le Christ insiste sur la matérialité de sa présence, sur son corps, ses mains, ses pieds. Mais cette présence expérimentale ne suffit pas à les convaincre. L’évangile nous dit que « dans leur joie ils n’osaient pas encore y croire » (Lc 24,41), en dépit du fait qu’ils le voyaient et pouvaient le toucher. Pour surmonter une deuxième fois cette retenue, le Christ partage à nouveau le repas avec les siens. Il leur demande à manger et lui offrent « un morceau de poisson grillé qu’il mange devant eux ». C’est une nouvelle manière de leur montrer qu’il est présent dans la réalité de son corps. Il partage le repas, mais aussitôt il y associe le mémorial : « Rappelez-vous les paroles que je vous ai dites… ». L’Eucharistie est ce repas où les chrétiens font mémoire de la passion-mort-résurrection du Seigneur. Elle est repas et elle fait mémoire. « Rappelez-vous ! … ». Jésus réitère la longue catéchèse du chemin d’Emmaüs ; sans cesse ses disciples auront à faire mémoire de son enseignement, mais surtout ils devront à leur tour enseigner : « c’est vous qui en êtes les témoins ».

Être témoin du Christ ressuscité implique avant tout la conversion du cœur dans le sens de la vérité et le renoncement à tout ce qui en nos vies est contraire à la justice de Dieu, à sa gloire et à sa sainteté. En continuant à donner raison au mal et au péché, nous nions par le fait même la résurrection du Christ comme une puissance de transformation et de renouvellement. Témoigner du Christ ressuscité consiste également à nous libérer de nos peurs et de nos illusions qui nous replient sur nous-mêmes et nous empêchent de nous ouvrir au Ressuscité qui revient continuellement à notre rencontre sur notre route d’homme.

Tous les récits des apparitions du Christ insistent sur ce dépassement comme démarche intérieure incontournable de tout vrai croyant. Dans l’extrait de l’évangile de Luc de ce jour, nous pouvons remarquer justement tous les efforts déployés par Jésus pour guérir la peur et le doute de ses amis : « Pourquoi êtes-vous bouleversés ? Voyez mes mains et mes pieds…Touchez-moi, regardez : un esprit n’a pas de chair ni d’os, et vous constatez que j’en ai ». Être témoin du Christ ressuscité, c’est donc croire fermement que Jésus n’est pas un spectre, ni un fantôme, ni un personnage de quelque conte mythologique, mais bien ce Jésus qui a partagé toute notre condition humaine, qui a connu la mort comme nous, et qui en est sorti victorieux et nous entraîne tous dans sa victoire. Au cours de cette Eucharistie, le Seigneur nous rejoint comme ce jour-là avec les disciples. Il nous invite à faire mémoire de sa mort et de sa résurrection, il partage avec nous le repas de sa présence, et il nous envoie témoigner de la joie de croire, du bonheur d’éprouver sa présence rassurante.

Amen.