Par Amos BAMAL

Matthieu 22, 34-40

                                 La loi de Dieu, c’est d’aimer…

Dans l’évangile de ce dimanche, les pharisiens cherchent encore une fois à mettre en difficulté Jésus, lui demandant à travers un docteur de la loi, quel est le grand commandement ? Cette question est fondamentale car dans la loi de Moïse il y avait 613 préceptes et interdictions. Devant ce foisonnement de prescriptions légales, certains s’interrogent sur leur hiérarchisation. Pouvait-on faire une sorte de classement entre eux ? Jésus n’a aucune hésitation. Il répond immédiatement : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit ». Voilà le grand, le premier commandement. Sur cette première partie de la réponse de Jésus les pharisiens sont certainement d’accord. Eux aussi pensaient que l’amour envers Dieu vaut bien plus que tous les autres commandements. En effet, Jésus répond ici en citant le « Shema » (Dt 6,4-9) la prière que tout juif récite plusieurs fois par jour.

Mais dans la seconde partie de sa réponse, Jésus les bouleverse et les scandalise parce que le deuxième commandement qui ressemble le plus au premier c’est l’amour du prochain. Non seulement Jésus affirme que Dieu ne s’oppose pas à l’homme, mais qu’il dilate son cœur et, en Dieu, celui-ci aime son prochain. Pour Jésus, il n’ya pas deux amours, il n’y en a qu’un et l’attitude envers le prochain vérifie la qualité de notre attitude envers Dieu. Il s’agit d’un amour qui est à la fois amour de Dieu et amour des hommes ; c’est-à-dire un amour qui s’exprime dans une transcendance, dans une verticalité et dans une horizontalité. Jésus ainsi humanise l’amour de Dieu et divinise l’amour du prochain. Dieu et l’homme, pour Jésus, sont l’objet du même amour. Il n’est donc pas question de choisir entre Dieu et l’être humain. En effet, chez la personne qui aime Dieu de tout son cœur, il reste encore du cœur pour aimer son mari, sa femme, ses enfants, son frère, sa sœur, un ami, son prochain, voire même son ennemi. Dieu ne vole pas le cœur, il le dilate.

Il est également vrai que même si le Scribe demande quel est le grand commandement (au singulier), et Jésus répond en en citant deux, l’amour envers Dieu est le plus grand et le premier :la primauté de Dieu est affirmée sans hésitation. L’amour pour l’homme vient en deuxième position. Mais en disant que le second est similaire au premier, Jésus affirme qu’entre les deux commandements il ya un lien très étroit. Certes, la mesure n’est pas la même : l’amour envers Dieu est « de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit ». L’amour pour l’homme est « comme soi-même ». Il ne s’agit pas de deux commandements parallèles, mis côte à côte. Il ne suffit pas non plus de dire que le second se fonde sur le premier. Beaucoup plus : le second (celui de l’amour du prochain) concrétise le premier (celui de l’amour de Dieu).

Dieu doit être le premier servi. Aimer Dieu c’est avoir foi en lui et l’adorer en priant, seul et en communauté. Aimer Dieu c’est participer à l’avènement de son règne par un engagement sans retenue au sein de l’Eglise, et participer à l’œuvre d’évangélisation du monde. C’est un devoir pour tout homme d’aimer Dieu, nous savons que nous sommes sa joie, que nous avons du prix à ses yeux.

En l’aimant nous nous savons nous-mêmes aimés de lui, nous nous savons pardonnés chaque fois que nous le lui demandons. En aimant Dieu, nous contemplons son amour pour tous les hommes, et nécessairement nous cherchons à l’imiter en aimant le prochain.

En se faisant homme, en se faisant proche de l’homme, Jésus a fait de l’être humain son prochain, et révélé aux humains qu’ils sont prochains les uns des autres. Le chemin pour aller à Dieu c’est notre prochain. Il est absurde de prétendre aimer Dieu et de ne pas aimer ceux que Dieu aime. Il est aberrant de se dire chrétien, et d’avoir parmi ses frères et sœurs chrétiens, certains que l’on déteste. Aimer l’autre c’est le soutenir dans les épreuves, partager sa joie, avoir de lui des idées positives, admirer ses qualités, l’encourager dans ce qu’il fait de bien. Aimer à la manière du Christ, c’est partager, accueillir, c’est se donner. Cela peut passer aussi par des gestes très simples, un sourire amical, une écoute humble, l’acceptation du point de vue de l’autre, un effort pour être aimable envers celui qui est désagréable. Ce dimanche, Jésus invite ses interlocuteurs à sortir de l’esprit légaliste : avec Dieu on est pas dans le domaine du calcul, de ce qu’il faut faire pour être en règle ; on est sous la seule loi de l’amour. Que le Seigneur nous aide à vivre et à incarner le commandement de l’amour de Dieu et du prochain, dans tout le quotidien de notre vie.

Amen.